RÉMI, RÉMI, RÉMI

Paroles Charles Trenet
Musique Charles Trenet
Interprète Charles Trenet
Année 1981

La deuxième des deux chansons très courtes qui ponctuent l'action dans le deuxième épisode (Un enfant surgit de l'ombre) du feuilleton télévisé Sans famille et que Trenet n'enregistra jamais sur disque.

LA FAMILLE DISPERSÉE
(Sans famille : 1er Volume ; Chapitre 21 ; Hector Malot ; 1878)

...

L’heure marchait vite ; encore un quart d’heure, encore cinq minutes et nous allions être séparés : Lise ne penserait-elle pas à moi ?

Au moment où le roulement de la voiture se fit entendre, elle sortit de la chambre de tante Catherine et me fit signe de la suivre dans le jardin.

- Lise ! appela tante Catherine.

Mais Lise, sans répondre, continua son chemin en se hâtant.

Dans les jardins des fleuristes et des maraîchers, tout est sacrifié à l’utilité, et la place n’est point donnée aux plantes de fantaisie ou d’agrément. Cependant dans notre jardin, il y avait un gros rosier de Bengale qu’on n’avait point arraché parce qu’il était dans un coin perdu.

Lise se dirigea vers ce rosier auquel elle coupa une branche, puis se tournant vers moi, elle divisa en deux ce rameau qui portait deux petits boutons près d’éclore et m’en donna un.

Ah ! que le langage des lèvres est peu de chose comparé à celui des yeux ! que les mots sont froids et vides comparés aux regards !

- Lise ! Lise ! cria la tante.

Déjà les paquets étaient sur le fiacre.

Je pris ma harpe et j’appelai Capi, qui, à la vue de l’instrument et de mon ancien costume, qui n’avait rien d’effrayant pour lui, sautait de joie, comprenant sans doute que nous allions nous remettre en route et qu’il pourrait sauter, courir en liberté, ce qui, pour lui, était plus amusant que de rester enfermé.

Le moment des adieux était venu. La tante Catherine l’abrégea ; elle fit monter Étiennette, Alexis et Benjamin, et me dit de lui donner Lise sur ses genoux.

Puis, comme je restais abasourdi, elle me repoussa doucement et ferma la portière.

- En route, dit-elle.

Et la voiture partit.

À travers mes larmes, je vis la tête de Lise se pencher par la glace baissée et sa main m’envoyer un baiser. Puis la voiture tourna rapidement le coin de la rue, et je ne vis plus qu’un tourbillon de poussière.

C’était fini.

Appuyé sur ma harpe, Capi à mes pieds, je restai assez longtemps à regarder machinalement la poussière qui retombait doucement dans la rue.

Un voisin avait été chargé de fermer la maison et d’en garder les clefs pour le propriétaire ; il me tira de mon anéantissement et me rappela à la réalité.

- Vas-tu rester là ? me dit-il.

- Non, je pars.

- Où vas-tu ?

- Droit devant moi.

Sans doute, il eut un mouvement de pitié, car me tendant la main :

- Si tu veux rester, dit-il, je te garderai, mais sans gages parce que tu n’es pas assez fort ; plus tard, je ne dis pas.

Je le remerciai.

- À ton goût, ce que j’en disais c’était pour toi ; bon voyage !

Et il s’en alla.

La voiture était partie ; la maison était fermée.

Je passai la bandoulière de ma harpe sur mon épaule : ce mouvement que j’avais fait si souvent autrefois provoqua l’attention de Capi ; il se leva, attachant sur mon visage ses yeux brillants.

- Allons, Capi !

Il avait compris ; il sauta devant moi en aboyant.

Je détournai les yeux de cette maison, où j’avais vécu deux ans, où j’avais cru vivre toujours et je les portai devant moi.

Le soleil était haut à l’horizon, le ciel pur, le temps chaud ; cela ne ressemblait guère à la nuit glaciale dans laquelle j’étais tombé de fatigue et d’épuisement au pied de ce mur.

Ces deux années n’avaient donc été qu’une halte ; il me fallait reprendre ma route.

Mais cette halte avait été bienfaisante.

Elle m’avait donné la force.

Et ce qui valait mieux encore que la force que je sentais dans mes membres, c’était l’amitié que je me sentais dans le cœur.

Je n’étais plus seul au monde.

Dans la vie j’avais un but : être utile et faire plaisir à ceux que j’aimais et qui m’aimaient.

Une existence nouvelle s’ouvrait devant moi.

En avant !

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