FEMME-OBJET

Paroles Bernard Lavilliers
Musique Pascal Arroyo
Interprète Bernard Lavilliers
Année 1994

L'album Champs du possible se termine par un très long (plus de six minutes, dont deux de final instrumental) hommage à la femme, débarrassée des mystères et des maléfices que la morale judéo-chrétienne lui attribuait ("Je sais qu'il est des yeux des plus mélancoliques / Qui ne recèlent point de secret sulfureux") et exaltée dans toute sa sensualité de "tigresse d'alcôve" ("Dans le jeu de miroirs de tes sous-entendus / Je n'ai que la mémoire d'un triangle entrevu"). Les trois couplets et les trois refrains de la chanson, tous en alexandrins, sont cependant entachés de plagiat, Lavilliers "oubliant" pour la troisième fois de l'album, après La femme et l'enfant et Grosse galette, de signaler la source à partir de laquelle son imagination s'est développée, L'amour du mensonge en l'occurrence, un poème de Baudelaire.

L'AMOUR DU MENSONGE
(Les Fleurs du mal ; Charles Baudelaire ; 1861)

Quand je te vois passer, ô ma chère indolente,
Au chant des instruments qui se brise au plafond
Suspendant ton allure harmonieuse et lente,
Et promenant l'ennui de ton regard profond ;

Quand je contemple, aux feux du gaz qui le colore,
Ton front pâle, embelli par un morbide attrait,
Où les torches du soir allument une aurore,
Et tes yeux attirants comme ceux d'un portrait,

Je me dis : Qu'elle est belle ! et bizarrement fraîche !
Le souvenir massif, royale et lourde tour,
La couronne, et son cœur, meurtri comme une pêche,
Est mûr, comme son corps, pour le savant amour.

Es-tu le fruit d'automne aux saveurs souveraines ?
Es-tu vase funèbre attendant quelques pleurs,
Parfum qui fait rêver aux oasis lointaines,
Oreiller caressant, ou corbeille de fleurs ?

Je sais qu'il est des yeux, des plus mélancoliques,
Qui ne recèlent point de secrets précieux ;
Beaux écrins sans joyaux, médaillons sans reliques,
Plus vides, plus profonds que vous-mêmes, ô Cieux !

Mais ne suffit-il pas que tu sois l'apparence,
Pour réjouir un cœur qui fuit la vérité ?
Qu'importe ta bêtise ou ton indifférence ?
Masque ou décor, salut ! J'adore ta beauté.

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