B. Lavilliers / Citizen Kane

Lavilliers a déjà donné des titres de films à ses chansons (ex.Extérieur nuit ; Rouge baiser) et son style ressemble parfois à un synopsis cinématographique (ex.Idées noires ; New York juillet), mais Citizen Kane est sa première (et la seule) tentative explicite de transposer un film en chanson. Cette transposition, à trois voix et en grande partie parlée, s'éloigne cependant de son modèle en donnant la mort de Kane comme un suicide. Il se pourrait donc plutôt que Lavilliers se reconnaisse dans ce personnage démesuré et qu'il profite surtout de la chanson pour parler de lui-même, de ses contradictions et de sa "solitude" (troisième apparition du thème dans l'album If...). Il n'est donc pas étonnant que cette projection d'un "grand fauve d'Amazone" dans "un grand requin des profondeurs" aille jusqu'à reléguer Viktor Lazlo et Serge Sauvion dans les oubliettes de la fiche technique de l'album : à la fois acteur et metteur en scène, Orson Welles ne phagocytait-il pas lui aussi Citizen Kane ?