LA SAMBA

Paroles Bernard Lavilliers
Musique Bernard Lavilliers
Interprète Bernard Lavilliers
Année 1974 (inédit 1975)

Première des six chansons déjà chantées en concert début 1974 et qui seront publiées sur l'album Le Stéphanois l'année suivante. Elle en sera la troisième clé, après San Salvador et Saint-Etienne, pour comprendre l'univers que Lavilliers est en train de mettre en place : La samba transpose la thématique de Brazil (la samba comme hymne du peuple des favelas contre "Les vautours de Rio" et le "Petit bourgeois d'Europe") dans une cité ouvrière française, où les "tempos exotiques" de cette musique jouent le même rôle subversif, avant que "Monsieur le directeur" ne rétablisse brutalement l'ordre dans son usine en y envoyant "les CRS de la répression rythmique". La samba mêle ainsi la veine ouvrière de Lavilliers et ses rêves de Brésil, tout en évoquant pour la première fois un personnage qui reviendra de temps à autre (ex.Noir et blanc ; Nord-Sud) hanter son univers, celui de l'artiste porte-parole de la contestation sociale et que le pouvoir tente de réduire au silence, y compris en l'assassinant. Un personnage dans lequel il ne fait guère de doute que Lavilliers se rêve.

L'INVENTION DE LA SAMBA
(L'Histoire n°366 ; Anaïs Fléchet ; juillet-août 2011)

Les origines de cette musique, comme celles du carnaval, remontent à la période coloniale.

Symboles du métissage et du dynamisme de la culture populaire, la samba et le carnaval occupent une place centrale dans la définition de l’identité brésilienne. « Ces chansons et ces danses noires mélangées à des vestiges de fado représentent peut-être la quintessence du Brésil », écrivait Gilberto Freyre en 1926. Pourtant, la samba et le carnaval n’ont acquis leurs lettres de noblesse qu’au terme d’une longue histoire marquée par l’alternance entre périodes de répression et de légitimation.

Les origines de la samba remontent à l’époque coloniale : les cortèges des folia dos reis et congadas qui accompagnaient les cérémonies religieuses catholiques, mais aussi les batuques, des divertissements organisés au fil de l’année par les esclaves en marge des plantations, souvent à l’insu de leurs maîtres, mêlant danses et chants accompagnés de percussions. La samba moderne est cependant bien plus récente : elle naît au début du XXè siècle à Rio de Janeiro, dans les quartiers de la Petite Afrique, qui regroupaient une importante population noire originaire du Nordeste. Elle est issue du métissage entre les polyrythmies africaines et les musiques de danses européennes et connut un premier succès populaire en 1917 avec Pelo telefone ("Au téléphone"), souvent considérée comme la « première samba ». L’entre-deux-guerres vit la création des écoles de samba sur les mornes de Rio : Deixa falar (1928), mais surtout Mangueira (1929) et Portela (1930). Ces dernières modifièrent les bases rythmiques de la samba et introduisirent de nouveaux instruments de percussion comme la cuica, petit tambour à friction d’origine angolaise, qui définit aujourd’hui la sonorité canonique de la samba carioca. Le genre se diversifia ensuite en de nouvelles déclinaisons comme la samba-cançao (samba-chanson), qui connut un rapide essor grâce à la radio, et la bossa-nova, née de la fusion avec le cool jazz nord-américain.

Les origines du carnaval remontent également à la période coloniale, quand les Portugais introduisirent au Brésil la fête de l’entrudo, qui précédait le carême et consistait à jeter sur les passants des sacs de farine, poudre de riz et autres liquides malodorants. Les esclaves en étaient les principaux acteurs, mais les familles de la bonne société se prêtaient également au jeu. Au XIXè siècle, l’entrudo suscita de violentes polémiques à mesure que l’idéal de « civilisation » s’imposait parmi les élites brésiliennes. L’entrudo disparut à la fin de l’empire, au moment même où le carnaval prenait son essor à Rio sur le modèle vénitien d’un défilé costumé. La fête était alors très hiérarchisée : d’un côté, les cortèges de l’élite sur l’élégante avenue Rio Branco ; de l’autre, les défilés populaires de la Praça Onze où la samba apparut vers 1915-1917.

La principale innovation eut lieu avec la création du concours des écoles de samba en 1932. Organisée par la mairie à partir de 1935, cette compétition modifia la physionomie du carnaval, contribua à la multiplication des écoles de samba et devint un temps fort de l’économie musicale et touristique du pays. Instrumentalisée par le pouvoir durant l’Estado novo, elle contribua à légitimer la samba et à imposer l’image d’un Brésil métis à l’étranger. En 1984, les écoles obtinrent la construction d'un espace réservé aux défilés, le Sambodrome, puis, en 2005, d'un lieu de répétition et d'exposition, la Cidade do Samba, menant à son terme le processus de patrimonialisation du carnaval. La fête conserve cependant des spécificités régionales : à Bahia, elle est rythmée par les afoxes, qui s'inspirent des musiques et danses de candomblé ; à Recife, par le faste du maracatu, danse processionnelle typique du Nordeste.

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